Glossaire & lexiques

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Meþveret Bþk.
Quelques définitions et réflexions autour des notions islamiques les plus courantes.


Glossaire

1. Quelques concepts utilisés pour les sciences islamiques


Ash-shahâda : l’attestation de foi et son témoignage par la formulation avec le coeur et l’intelligence de “J’atteste qu’il n’est de dieu que Dieu et que Muhammad est Son envoyé”. Elle est le fondement, l’axe et la détermination de 1’ "être musulman"


Ash-sharî’a : il n’existe pas une seule définition du concept de sharî’a. Les savants ont en général circonscrit son sens à partir de leur domaine de spécialisation. En partant de l’acceptation la plus large à la plus réduite, nous pouvons présenter les définitions comme suit :


1. Ash-sharî’a, sur la base de la racine du mot, signifie "la voie", "le chemin qui mène à la source" et exprime les contours d’une conception globale de la création, de l’existence, de la mort et du mode de vie qui en découle née de la lecture normative et de la compréhension des sources scripturaires. Elle détermine le “comment être musulman”.



2. Ash-sharî’a, pour les usûliyyûn et les juristes, est le corpus des principes généraux de la loi islamique extraite des deux sources fondamentales, le Coran et la Sunna, avec l’utilisation des autres sources principales (al-ijma’ et al-qiyas) et secondaires (al-istihsan, istislah, istishab, ’urf).




Al-’aqîda : la foi et toutes les questions qui se rapportent aux six piliers d’ al-imân (Dieu, Ses noms, Ses attributs, les anges, les prophètes, les livres, le jour du Jugement dernier et la prédestination). De façon général, étudie ce est au-delà de la perception sensible. Ne recouvre pas exactement, contrairement à la présentation proposée par certains orientalistes, les domaines de la théologie ni ceux de la dogmatique chrétienne. Elle ne correspond pas non plus au domaine de la philosophie, entendue au sens de la philosophie occidentale.




Usûl al-flqh : Fondements de la loi islamique : expose les principes et la méthodologie au moyen desquels les règles du droit et de la jurisprudence sont déduites et extraites de leurs sources. Etudes et formulation des règles d’interprétation, obligation et interdit, principes globaux, ijtihâd (ijmâ’, qiyas), etc.




Al-fiqh : la loi islamique, tout à la fois le droit et la jurisprudence islamiques. Comporte deux sections générales qui sont basées sur des approches méthodologiques différentes et opposées. Al-’ibâdât, les affaires cultuelles, seul est permis ce qui est prescrit. Al-mu’âmalât, les affaires sociales, où tout est permis sauf ce qui est explicitement interdit.




At-tasawwuf : le soufisme. C’est en fait une science, la science de la mystique, qui a un cadre, des normes, un vocabulaire technique et spécialisé. Elle nécessite une initiation. Synthétiquement, elle comprend les différentes études de savants ou d’écoles relatives aux étapes et aux états permettant le cheminement intime vers Dieu. C’est la dimension d’ al­haqîqa de la vérité, de la Réalité spirituelle ultime, que connaissent les rapprochés.
 

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2. Quelques termes techniques


Ahâdith, plur. de hadith : traditions rapportées et authentifiées de ce qu’a dit, fait ou approuvé le Prophète.


Ahkâm, plur. de hukm lois, valeurs, prescriptions, ordonnances, jugements, loi émanant du droit islamique.


Asl plur. usûl racine, origine, source, fondement


Ayah, plur. âyât : signe, indication mais également verset


Dalâla : sens, implication


Dalîl : preuve, indication, évidence, support et source scripturaire


Dhannî : peu explicite, laissant place à la conjecture quant à son origine et/ou offrant une marge d’interprétation quant à sa signification


Dhâhir : manifeste, apparent. Le sens du texte dans sa littéralité.


Far’, plur. furû’ : branche, subdivision, élément secondaire par opposition à racines, fondements (usûl). Signifie également un cas nouveau dans la pratique du qiyâs.


Fard ‘ayn : obligation, devoir personnel, individuel


Fard kafâ’î (kifâya) : obligation collective. Si une partie de la communauté s’en préoccupe et s’en charge, le reste en est déchargé.


Fatwâ, plur. fatâwâ : avis juridique circonstancié : il peut être soit le simple rappel d’une prescription établie explicitement par les sources soit une élaboration du savant sur la base d’un texte peu explicite ou dans le cas d’une situation particulière pour laquelle il n’existe aucune source scripturaire.


Hukm taklîfî : loi restrictive définissant les droits et les obligations. Basée sur la responsabilité humaine.


Ijmâ’ : consensus d’opinion au sens d’avis unanime ou majoritaire


Ijtihâd : littéralement “l’effort”, est devenu un terme technique signifiant l’effort effectué par un juriste, soit extraire une loi ou une prescription de sources scripturaires peu explicites, soit formuler un avis juridique circonstancié en l’absence de textes de référence.


‘illah : la cause effective d’un jugement particulier. Permet la compréhension d’un jugement en sa cause et offre ainsi la possibilité d’élaborer d’autres jugements par analogie ou extension.


Istihsân : juger une chose bonne, c’est en fait l’application de la “préférence juridique”


Istishâb : présomption de continuité de ce qui fut antérieurement prescrit.


Istislâh : considération liée à l’intérêt public


Istinbât : extraction, tout à la fois inductive et/ou déductive, du sens implicite ou caché d’un texte donné. Plus largement, il s’agit de l’extraction, de la mise en évidence, des lois et prescriptions stipulées par une source scripturaire.


Jumhûr : majorité dominante, utilisé en faisant référence aux avis divergeant des savants afin de savoir quelle est l’opinion majoritairement retenue. Ce qui n’enlève pas sa validité à l’opinion minoritaire si elle est fondée.
Kalâm : littéralement “discours”. Dans ‘ilm al-kalâm, il est tout à la fois apparenté à la philosophie islamique mais touche des domaines qui relèvent, dans la répartition des domaines en Occident, à la théologie ou à la dogmatique. Cette science, par plusieurs aspects, se situe à l’intersection des trois sphères susmentionnées.
Madhhab, plur. madhâhib : école juridique
Makrûh : détesté
Mandûb (ou mustabab) : recommandé
Maqâsid, sing. maqsûd : objectifs, buts, finalités
Maslaha considération de l’intérêt public
Mubâh : permis
Mukallaf : une personne ayant atteint l’âge de la puberté, en pleine possession de ces facultés
Muqayyad : limité, délimité, défini, déterminé, circonscrit. Qualifie également un mujtahid qui élabore des avis juridiques à l’intérieur d’une école juridique spécifique.
Mutlaq : absolu, non délimité. Qualifie également un mujtahid qui a la compétence de formuler des avis juridiques au-delà des ement à partir des sources.
Qat’i : décisif, explicite, défini, ne laissant aucune marge de spéculation quant à son interprétation.
Rukhsa, rukhas : allégements dans la pratique ou l’application des prescriptions à cause par exemple de l’âge, la maladie, le voyage, la pauvreté, les conditions sociales, etc.
Rukn, plur. arkân : pillier, fondement essentiel
Shart, plur. shurût : condition, parfois critère
Shûrâ : consultation, concertation
Sahîh : authentique, répondant à des critères spécifiques d’authentification
Ta’wîI : interprétation, plus spécifiquement dans les sciences de la foi : interprétation allégorique et métaphorique

Takhsîs : spécification, du général au cas particulier
Taklîf : responsabilité, obligation
Taqlîd : imitation. En matière de droit, imitation aveugle des prédécesseurs sans questionner, évaluer, vérifier ou critiquer leurs avis juridiques.
Tazkiyyah (an-nafs) : effort de purification spirituelle, initiation à l’élévation spirituelle.
Ummah : communauté de foi, communauté spirituelle, unissant toutes les musulmanes et tous les musulmans du monde dans leur attachement à l’islam
Wâjib : obligation, souvent synonyme de fard sauf chez les juristes hanafites.
 

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3. Termes utilisés pour qualifier différents statuts de savants




‘Alim, plur. ‘ulamâ’ (oulémas) : littéralement, “celui qui sait”. Savant au sens large qui peut être spécialisé dans l’un ou l’autre des domaines des sciences islamiques. Peut aujourd’hui qualifier ceux qui sont sortis d’une université avec un diplôme dans un domaine ou un autre en rapport avec les sciences islamiques (on utilise également le terme mawlâna pour exprimer l’idée de "savant" ou de sheikh).


Sheikh, plur. shuyûkh littéralement “vieux” : qualifie en général les personnes ayant eu un diplôme dans l’une ou l’autre des sciences islamiques. Il s’utilise également de façon très large pour marquer le respect ou la reconnaissance des étudiants à l’égard des compétences de leur enseignant même si celui-ci n’a pas de diplôme officiel. Il faut noter quelques évidents excès en ce sens. Dans les voies et cercles mystiques, le sheikh est le maître initiateur qui guide et accompagne le murîd (l’initié en quête de savoir) sur la voie de la connaissance et de l’élévation.


Imâm, plur. a’imma : littéralement, “celui qui se place devant”. Se dit de toute personne, formée ou non, qui guide la prière ou officie durant le sermon du vendredi. Plus spécifiquement, on emploie ce terme pour qualifier un savant qui a historiquement marqué (ou marque) de son empreinte l’élaboration des sciences et des connaissances islamiques et ce, plus particulièrement, dans le domaine du droit et de la jurisprudence. Ainsi on parle des “grands imâms (a’imma)” en pensant à Abû Hanîfa, Mâlik, ash-Shâfi’î ibn Hanbal ou Ja’far as-Sâdiq, par exemple. Il peut s’agir d’une marque de reconnaissance de la part de la communauté dans son ensemble ou parfois, de façon plus circonscrite, de l’entourage, de l’école de pensée ou encore de l’organisation dans laquelle a pu s’ engager ledit savant.



Mujtahid : savant travaillant sur les sources scripturaires afin d’en induire ou d’en déduire les jugements et les prescriptions juridiques. Il a la compétence reconnue de pratiquer 1’ ijtihâd (même racine arabe, ja-ha-da) sur les textes non explicites ou en l’absence de textes spécifiques. De nombreuses qualités sont requises pour atteindre ce niveau de compétence :

1. Une connaissance de la langue arabe ;
2. Une connaissance des sciences du Coran et du hadith ;
3. Une connaissance profonde des objectifs (maqâsid) de la sharî ‘a ;
4. La connaissance des questions faisant l’objet d’un consensus : cela nécessite de connaître la substance des travaux sur les questions secondaires (furû’)
5. La connaissance du principe du raisonnement analogique (qiyâs) et de sa méthodologie ;
6. La connaissance du contexte historique, social et politique ; c’est-à-dire, la situation des gens qui vivent autour de lui (ahwâl an-nâs).
7. La reconnaissance de sa compétence, de son honnêteté, de sa fiabilité et de sa droiture (voir analyse détaillée, dans la deuxième section de notre première partie).



Les oulémas ont distingué deux types de mujtahid pour lesquels les critères de compétences sont différents :


1. al-mujtahid al-mutlaq (absolu) : extrait les prescriptions et les avis juridiques dans un rapport direct avec les sources et au-delà de tous critères d’écoles spécifiques. Sa connaissance reconnue des textes et des fondements méthodologiques lui permettent d’édicter des avis qui ne se réfèrent pas nécessairement aux écoles de droit et à leur norme.


2. ai- mujtahid al-muqayyad (limité) se contente de déduire des prescriptions dans le cadre d’une école juridique spécifique. Les conditions requises pour ce dernier sont bien entendu moins exigeantes ; on y ajoute la connaissance des règles de déduction liées àl’école juridique à laquelle il appartient ou à laquelle il se réfère.


Mufti : certains savants ont souvent utilisé de façon indifférencié le terme de “mujtahid et celui de “mufti”, c’est le cas par exemple de ash-Shatibî (dont nous parlons dans la deuxième section de la première partie). Le lien semble effectivement naturelle puisque la pratique de 1’ ijtihâd est nécessaire à la formulation de la fatwâ (même racine que mufti). Le mufti est donc celui qui édicte des avis juridiques à partir des textes non explicites ou en l’absence de textes spécifiques. Trois légères spécificités ont été mises en évidence par les savants pour expliquer la différence de dénominations et de fonctions. - Le mufti est clairement à la disposition de la communauté ou des individus, il a fonction de répondre aux questions et ce sont ces dernières qui orientent sa réflexion ; ce n’est pas le cas du mujtahid qui n’est pas forcément soumis à la question et peut travailler en amont. - Davantage que le mujtahid, parce qu’il travaille en aval et en interaction plus directe avec son environnement, le mufti doit connaître les gens et la société où il vit ; cette exigence est requise pour le mujtahid mais de façon moins expresse. Enfin, d’aucuns ont relevé une simple différence de fonction institutionnelle : le mufti est un mujtahid qui a été engagé par l’Etat ou est au service d’une institution particulière pour édicter des avis juridiques et orienter l’administration des affaires. Le mufti serait donc, simplement, un mujtahid devenu fonctionnaire.
Les mêmes distinctions existent chez les savants concernant le mufti mutlaq et le mufti muqayyad.


Usûlî, plur. usûliyyûn : savant versé dans la connaissance des fondements de la loi islamique. Il travaille sur le Coran et la Sunna, doit maîtriser les instruments juridiques et connaître les principes et la méthodologie au moyen desquels les règles du droit et de la jurisprudence sont déduites et extraites de leurs sources. Il étudie les règles d’interprétation, les domaines ayant trait à l’obligation et à l’interdiction, ainsi que les règles générales d’orientation. Les principes d’application de 1’ ijtihâd , de l’ijmâ’ ou du qiyâs sont aussi de sa compétence sans que cela veuille dire qu’il ait la compétence de les appliquer lui-même. Son savoir est d’abord essentiellement théorique. Un mujtahid ou un mufti maîtrisent forcément le champ de savoir et de compétence du savant des usûl mais ce dernier n’est pas immédiatement ni forcément un mujtahid ou un mufti puisque son savoir peut n’être que théorique, lui permettant uniquement d’identifier les instruments de l’extraction et de la déduction sans avoir la compétence d’en faire usage.


Faqîh, fuqahâ’ : littéralement “qui comprend profondément”. Défini en général le juriste qui maîtrise les sciences du droit et de la jurisprudence, mais le titre est parfois utilisé pour des savants aux compétences très diversifiées. En se référant à l’étymologie, on peut qualifier ainsi un individu possédant un grand savoir religieux, sans penser à un domaine particulier de spécialisation. Dans la langue des spécialistes, il s’agit plutôt de celui qui connaît la matière juridique sans forcément avoir les compétences permettant d’élaborer et de formuler des avis juridiques circonstanciés et/ou nouveau. Son savoir peut se référer à une école précise ou àplusieurs, il peut savoir les avis énoncés sur une question donnée de droit, il peut par exemple connaître les points de divergences entre les savants, il peut également énoncer un ou plusieurs avis juridiques déjà stipulés mais sa compétence s’arrête en général à cette limite. Le mujtahid ou le mufti sont en général des fuqahâ’ reconnus mais un faqîh respecté n’est pas forcément un mujtahid ou un mufti.
 
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